jeudi 22 octobre 2015

Tour d'Islande...10 - Une journée normale...ou presque.


Stykkisholmur - Thingeyri

Jeudi 6 Août 



Oui, normale, comme notre président.


Ou presque.

Depuis le début de mon voyage, il faut se rendre à l'évidence, peu de choses se passent comme prévues ou, du moins, comme la part consciente de moi-même l'avait imaginé. En revanche, je pense que mon inconscient, lui, avait plus ou moins espéré tout ce bordel... 
Les ennuis mécaniques, les rivières, les pistes et chemins, le camping sauvage au milieu de nulle part, la moto enlisée, la caméra perdue puis retrouvée, les multiples rencontres improbables, le fait de ne jamais savoir où je vais poser mes roues le soir, le vent surréaliste, la balade sur une autre planète, et j'en passe, ont fait de ce début de voyage une expérience bien différente de ce que j'ai connu lors de mes deux petites expéditions précédentes.

Mais aujourd'hui, pour la première fois depuis que mon tracteur sillonne les routes d'Islande, je vais vivre une journée normale. 

Alors certes, tout est relatif, parce qu'arpenter des pistes était tout sauf normal il y a à peine quelques jours, entre autres!

Bref...

En ce matin, mon premier réflexe va être de me jeter sur les prévisions météo. Non pas pour savoir s'il va pleuvoir ou faire froid, ça, ça fait déjà bien longtemps que je n'en ai plus rien à foutre. Non, je veux juste savoir s'il va y avoir du vent. Et ma tension va diminuer de trois points, au moins, quand je vais voir que de vent, aujourd'hui, il n'y aura point. 

Allez Lou Yah!

Amen.

A peine sorti du camping que me voilà déjà sur des gravels roads...Il fait toujours gris et assez froid, mais comme depuis le début du voyage, je passe entre les gouttes, évitant chaque jour la vraie pluie! Il faut dire qu'avec ce que je me suis pris l'année dernière dans les Alpes (voir les archives du blog), mère Nature me devait bien ça!

C'est reparti!








A peine quelques kilomètres après mon départ, je vais trouver un emplacement haut perché me donnant une vue imprenable sur les fjords. Les magnifiques fjords d'Islande...les maudits fjords d'Islande aussi, tellement difficiles à resituer à leur juste valeur à travers mes photos. Ils sont immenses, loin et proches à la fois...la mer et son odeur, le bruit du vent, cette lumière douce...comment restituer ça en photo?  






Ce que je n'ai pas su faire à ce moment là, c'est également gérer ma manœuvre de demi-tour...ça faisait longtemps. 

Au moins 5 jours.

Trop de photos tue la moto, épisode 6! Ou 7...On ne sait plus à force.

Il faut savoir être fier de sa connerie. 

Toujours! (Illustration: Botan-a-becane.fr)

Bon, j'avoue, c'est d'autant plus facile d'être fier de sa connerie que le gars dans le camping-car derrière viendra m'aider à me sortir de là sans encombres.

Mais passons...faut rouler!










Le début de la journée se fera très majoritairement sur les routes...petite exception tout de même avec une excursion sur une vraie piste...excursion assez vite avortée: j'ai encore la hantise de casser à nouveau mon tracteur.







Si la journée ne fut clairement pas la plus marquante du voyage, j'ai en tête un moment particulier...je roule alors sur une gravel road, un peu dans les terres, ça grimpe gentiment, ça tourne à l'avenant. Je monte, je monte, je ne vois qu'un chemin de terre et de la verdure, quand apparaît d'un coup un panorama gigantesque. Le genre de spectacle qui fait arrêter son tracteur direct, en plein milieu de la route...

Pause clope et contemplation obligatoire!


Un peu plus loin c'était pas mal non plus...




Encore lui!

Et ainsi va continuer la journée, entre grandes plaines et fjords...








Des plaines, des fjords, et des moutons rigolos. Des moutons rigolos, tendance grosses boules de poils, mais peureux, fuyants mon appareil photo à la moindre approche.

Enfin quand je dis peureux, ce n'était pas le cas de tous. En fait j'ai pu remarquer que dans chaque troupeau, il en a toujours un, généralement avec des cornes bien sûr, qui lui, reste à vous regarder fixement.

Très fixement.

Le regard vide, bé-hé-lliqueux, voir carrément menaçant, ils nous rappellent pourquoi certains représentant plus ou moins lointains de son espèce sont devenus des symboles satanistes.

Bé-hé

Je vais donc m'en aller lentement, très lentement, pour continuer ma petite balade pédestre du jour...dans une ambiance dégueulasse. Ou pas.

La pause sandwich du jour...




Et je vais reprendre ma route.












Pas de casse mécanique, pas de vent, un froid présent mais raisonnable, à peine quelques gouttes de pluie...C'est presque trop facile!










Presque trop facile, et je l'avoue, presque chiant. Les paysages deviennent de plus en plus beaux au fur et à mesure que je m'enfonce dans les fjords, l'ambiance est particulière: calme, feutrée, elle pousse à l'introspection. Mais je vous l'avoue, tout cela finit par manquer un peu de piment!

C'est alors que, sur un coup de tête, je vais de nouveau prendre une gravel road, sans trop savoir où cela me mènera...







Et me voilà prenant de l'altitude...













En quelques kilomètres, la température va significativement baisser. La brume, et la neige, vont faire leur apparition. 






Les moments qui vont suivre vont être la cerise sur le gâteau de cette belle journée "normale"!

Il fait vraiment froid, j'ai remis les gants d'hiver, et malgré mon équipement je me caille les miches. Peu importe, me voilà de nouveau au milieu de nulle part...


Et ça, j'aime!








Après encore quelques kilomètres...


...sur une piste légèrement boueuse...

...va suivre un petit moment de grâce...perché sur un gros rocher, au bord d'un gouffre de plusieurs dizaines de mètres, je vais avoir face à moi, pour moi tout seul, une immensité déserte parsemée de lacs et de plaques de neige. Je vais en oublier le froid, et me poser là pendant une bonne dizaine de minutes, sans penser à rien. Sauf au fait que, décidément, ce voyage est complètement dingue et imprévisible!





Après cet instant de contemplation, encore un, il sera temps...temps de faire une belle pose de conn*rd! Le moment s'y prête particulièrement, et je me rend aussi compte que je n'en ai pas fait beaucoup depuis le début du voyage (honte sur moi).



Pose de conn*rd / Niveau expert.
Je vis tout simplement un des plus beaux moments du voyage, un moment inattendu et simple, dans le meilleur sens du terme! Mais il fait franchement froid...et il est donc temps de retrouver la vallée avant de mourir congelé ou dévoré par un ours polaire.

Sur le chemin, encore une belle surprise: un ensemble de chutes d'eau...et contrairement à celles de Skogafoss vues quelques jours auparavant, ici, point de touristes!
Je vais donc déambuler pendant une petite heure en m'essayant pour la première fois, ou presque, aux poses longues avec ma boîte à image.















Je vais hésiter quelques instants à planter ma tente ici...mais il n'est que 17h30 et j'ai encore trop envie de rouler!

Ce sera vraiment le grand plaisir ce jour-là, rouler, rouler longtemps, rouler sans soucis de pneus, de mécanique, sans stresser en raison de potentiels passages de gués. Même si ces gués, ils commencent à me manquer...ceci dit, et même si à cet instant je ne le sais pas encore, des gués, je vais en repasser d'ici la fin du voyage, et pas des moindres!

Mais nous n'en sommes pas encore là, revenons dans les fjords...






Et revenons dans la brume, pour ma dernière montée en altitude de la journée...







On est pas bien là??


J'ai rien  fait, c'est pas moi. J'ai écrasé personne. Enfin pas ici...

Puis il va être temps de rejoindre un semblant de civilisation, et de planter sa tente quelque part. J'aurais pu faire du camping sauvage, mais mon PC n'a plus de batterie, et celle de mon appareil photo commence à être limite, j'ai donc besoin d'un branchement...Je vais alors me diriger vers la petite ville du coin et m'installer dans le camping local officiel.





Le petit camping sera rapidement trouvé, et je vais passé ma soirée à jongler entre ma popote et mon ordinateur, continuant à rédiger mes brouillons pour le blog. Voici comment va se conclure cette journée presque normale...Une très belle balade, détendue, dans un cadre radicalement différent de ce que j'ai pu voir au début de mon voyage.

Mais cette journée, elle sera marquante pour autre chose. Aujourd'hui je commence à prendre conscience d'une chose: ma philosophie du voyage a radicalement changé en à peine quelques jours. Cette étape, si je l'avais fait l'année dernière, ou même si je l'avais réalisé au tout début de mes aventures Islandaise, avant le n'importe quoi, avant le Landmannalaugar, avant les rivières, avant les pistes bosselées et rocailleuses, je ne l'aurai pas trouvé "normal".

Je l'aurais trouvé fantastique et extraordinaire. Et elle l'était, au final!

Le problème, si j'ose dire, c'est que j'ai maintenant goûté à l'aventure. La petite et gentille aventure...mais l'aventure quand même. Et j'en veux encore. Je veux du stress, de l'adrénaline, de l'imprévu, et surtout, du challenge!

Du coup, je vais commencer à avoir un peu peur que le meilleur du voyage soit derrière moi...C'est d'ailleurs quelque chose que j'ai ressenti aussi dans mes précédentes escapades. Dans mon Tour de France, comme dans mon Tour des Alpes, il y a eu un jour ou deux où je me suis vraiment demandé, après plusieurs étapes d'aventures incroyables pour moi à ces époques, si le reste du voyage ne serait pas insipide...Mais à chaque fois la suite des événements m'a montré que je n'aurais pas du m'en inquiéter.

Et bien cette année, ce sera pareil!

Ce soir là je ne le savais pas encore, mais la deuxième partie de mon voyage va m'offrir les souvenirs les plus fous de toute ma vie, entre raid sauvage au centre de l'Islande, coups de fatigue et échecs magistraux, rencontre avec l'agence tout risque, pannes mécaniques, et surtout...une épopée en binôme inoubliable dans le Mordor!

A suivre...













3 commentaires:

  1. Bonjour le motard bionique !!!!
    Je me régale toujours autant à lire tes aventures et j'en prends plein les yeux à chaque photos, elles sont magnifiques !!! continue à nous vendre du rêve !!!
    Par contre, juste une petite remarque suite à ce texte et, je pense une petite erreur de ta part, quant au symbole satanique }:-)
    En effet pour moi c'est le le bouc (ATTENTION jeu de mot inside !!! mâle y corne de la chêvre) et non le bélier (mâle à corne du mouton)...plusieurs références sur le Net parlent bien du Baphomet, bouc satanique....voili voilou....
    Si jamais tu repasses dans le coin de Montpellier (vu que je crois que tu es originaire de juste à côté ;-) ) je me ferai un plaisir de te payer une bière et discuter avec toi de moto, voyage et autres...!!!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. avec un minimum d'autentification c'est mieux si jamais tu passes effectivement sur Montpellier ;-)

      Supprimer
  2. Je ne me lasse pas non plus de te lire et de regarder ces magnifiques photos de ton périple ;-) Merci !

    RépondreSupprimer