mardi 19 janvier 2016

Tour d'Islande...16: A la recherche du précieux (Part 3)


Quelque part pas loin du Mordor

Lundi 10 Août - Mardi 11 Août



Résumé de l'épisode précédent: A la recherche du précieux (Part 2)

Il y a quelques heures, je rejoignais Christelle afin d'effectuer un raid en direction du centre de l'Islande, et plus précisément vers la région d'Askja. Après des dizaines de kilomètres de piste et quelques péripéties incluant une belle chute, nous avons du faire face à un énorme gué.

Aimant faire n'importe quoi, j'ai alors décidé de le traverser tel le kamikaze frénétique, et c'est là que tout a dérapé...Moto submergée par l'eau et hors de fonction pour cause de moteur noyé et de sélecteur de vitesses récalcitrant, nous avons réussi à rejoindre un petit refuge en tractant mon tracteur, à la sangle, avec la bécane de Christelle. Une fois les tentes installées et une bière miraculeusement dégotée, voilà que l'on m'appelle...la responsable du refuge a contacté des "gens", et ces "gens" viennent d'arriver. 

Quels gens?



L'Agence Tout Risque.


Ou plus exactement, les rangers de la "Air Groud Search and Rescue Team"...

Phoque. Ouai.

A peine le temps de dire bonjour et de baragouiner un truc genre "I have some water in the engine", que voilà déballé sous mes yeux une énorme trousse à outil. Il est plus de 21h30, et c'est ainsi que débute une des soirée les plus hallucinantes de ma vie...

Bidons d'huile sortis du camion, les rangers vont commencer par effectuer la vidange de la moto, et me voici donc maintenant à quatre pattes sous la moto pour récupérer l'huile usagée...



Enfin quand je parle d'huile, à ce stade là je devrais plutôt parler de...

Mayonnaise!

Collecte de l'huile moteur ralentie par mon sabot de protection qui fait alors un peu office d’entonnoir...cela va donc durer un certain temps. Surtout que ce mélange d'huile et d'eau est particulièrement épais.

J'ai alors la tête sous la moto, et la seule chose que je vois, ce sont des pieds...ça s'agite, ça va et vient, et j'entends que ça cause. Ça cause beaucoup, tantôt en Islandais, tantôt en anglais, mais dans tous les cas je ne comprends rien.


Et lorsque je finis par relever la tête, je vois tous ces mécanos de l’extrême en train de désosser mon réservoir! Mais ils font quoi là???

Mai-euuuuuuh! Pov' tracteur!






Le filtre à air démonté, il ira passer le reste de la soirée sur le chauffage du camion afin qu'il sèche au maximum...tandis que pour le filtre à l'huile, un des rangers passera son temps à le nettoyer en le rinçant avec une huile saine.

Oui mais voilà, il veulent regarder dans le moteur pour voir si de l'eau ne se serait pas infiltrée jusque dans les pistons - ou un truc dans le genre, je n'y connais rien moi en mécanique. Sur ce coup, le tracteur va leur donner un peu de fil à retordre...





La nuit tombe - les photos sont plus lumineuses que la réalité - et le froid aussi. Je me les gèle, mes doigts sont congelés...et eux, ils bossent comme si de rien n'était. Et avec le sourire!

Le filtre à air est sec, le filtre à huile est nettoyé, la moto est vidangée, le moteur est contrôlé, moi j'hallucine complètement, Christelle aussi d'ailleurs! 
Mais ce n'est pas fini...Les voilà maintenant qu'ils s'attaquent au sélecteur de vitesse - et accessoirement à la vidange de boîte!

Et ce que je pensais être un problème mineur va se révéler un vrai casse-tête !


Je vais me retrouver à soulever l'arrière de la moto en compagnie du Barracuda local, afin de pouvoir vérifier le bon fonctionnement de la transmission...bon, ok, en fait il l'a soulevé presque tout seul cette moto! 
Autant vous dire que Christelle et moi sommes dans un état d'incrédulité maximal.Nous sommes en plein cœur de l'Islande, "au milieu de nul part", dans les cailloux, la terre, le froid et le vent, et des gars sont en train de me remettre ma moto en état de marche!!


Incrédule certes, mais une partie de moi reste pragmatique. Oui, c'est génial ma moto est quasiment réparée. C'est génial et improbable...mais combien est-ce que cela va me coûter? Cela fait deux heures que cinq ou six personnes travaillent de nuit à cause de ma connerie...

Finalement, et alors que je suis en train d'envisager de vendre mon corps au premier venu pour payer la futur facture, ce maudit sélecteur sera réparé avec quelques coups de marteau sur l'axe. Bref, ma moto est prête à rouler, et le jeune mécanicien en chef va tester ça de façon...un peu extrême.

Il fait maintenant vraiment nuit, mon feu de croisement est hors service et seul reste une loupiote de plein phare qui n’éclaire au final absolument rien. Et voilà que ce charmant jeune homme part comme un bourrin dans les chemins. La moto gronde, des gerbes de flottes jaillissent à intervalles réguliers...

"Ce serait quand même très con qu'il explose ma moto maintenant que c'est réparé..."

Cette petite remarque aura au moins eu le don de faire rigoler l'assemblée!

Le voilà donc qui revient, sans être tombé...ce qui est plutôt une bonne nouvelle.

"Is it ok?" lui ai-je demandé...

Il va me répondre par un geste que l'on pourra traduire par "bof"...il faut que l'on reparte, et dès que possible, refaire une vidange. En tout cas, on peut repartir! On ne verra pas Askja, mais franchement, sur le coup, j'en ai rien à péter...le tracteur est réparé!!!

INCROYABLE!!!

Hannibal Smith approuve!

Après une première salve de remerciements, je me dirige vers celui qui semble être le chef, et lui pose la question qui fâche...comment faire pour payer, et combien cela va me coûter? 

Je vais avoir beaucoup de mal à bien intégrer ce qu'il va me dire alors. Mais en gros:

- "Nous sommes l'équipe d'urgence, il n'y a rien à payer..."

Je n'arrive même pas à trouver une image à deux balles pouvant illustrer la tête que j'ai tiré à ce moment. Déjà infiniment reconnaissant pour tout leur travail, je vais m'agenouiller et faire la révérence devant chacun des membres de cette sympathique équipe! Et tous les prendre dans mes bras un à un!
Je n'y crois toujours pas, non seulement je m'en suis sorti, mais en plus ça ne me coûte rien!  Il y a tout juste deux heures j'envisageais la fin du voyage, le rapatriement de la bécane, les franchises d'assurances et autres malus...mais non!

Alors je sors mon porte-feuille et fouille pour trouver toute la monnaie que je peux...il n'y avait pas grand-chose, même pas l'équivalent d'une pinte de bière chacun, mais j'y tenais!

Et voilà...ils repartent, comme si de rien n'était. Je n'ai pas osé les prendre tous en photos de peur qu'ils croient que je n'avais pas conscience que j'avais fait un peu le con, ou qu'ils pensent que cette réparation de l'extrême ne soit qu'un simple souvenir de vacance un peu folklorique...et je le regrette bien.

Je ne les oublierai jamais ces gars là!!!

Il est maintenant plus de minuit et nous nous retranchons dans l'énorme tente de Christelle afin de boire cette fameuse bière resquillée tel un gros crevard quelques heures avant. Je vous avoue que je ne sais plus trop de quoi nous avons parlé...nous étions tellement fatigué par cette longue et folle journée. D'autant plus qu'avec la fin de cette réparation épique, la pression baisse et vient un gros coup de barre peu étonnant.
Moi, je me rappelle que j'avais toujours un peu honte de ma cascade, et elle, elle était mal à l'aise de m'avoir embarqué là-dedans. Alors on va se rassurer mutuellement, en repensant à cette extraordinaire journée qui se finit si bien! Quelques calories avalées et il sera temps pour chacun de filer dans son sac de couchage...car demain, il va falloir repasser les mêmes gués, avec pour ma part, une moto certes réparée mais qui aura très vite besoin d'une nouvelle vidange.

Espérons qu'elle tienne le coup, car cette fois, nous n'aurons plus droit à l'erreur!

Le retour de la Roulette Islandaise.

Si je vais vite m'endormir, ma nuit sera tout de même très agitée. J'ai des coups d'angoisse...vais-je réussir à retraverser ces gués sans me planter? La moto va-t-elle tenir? Et ces angoisses vont aller crescendo à mesure que je me prendrai de plus en plus souvent la toile de ma tente dans la tête, tendue par un vent de plus en plus puissant...il me semblait même qu'il pleuvait à ce moment là. C'es limite la tempête là dehors, et ça, ça risque de ne pas faciliter les choses!

C'est donc l'angoisse, et je vais avoir définitivement les yeux ouvert bien tôt. Le vent est très présent, le froid aussi. Mais petit à petit l'angoisse va se muer en impatience...quitte à y passer, autant que ce soit le plus vite possible, autant être fixé tout de suite!

Après un petit café, il sera temps de démonter les tentes...et de profiter du paysages sous un soleil qui semble prendre possession des lieux, pour mon plus grand bonheur!

Un cadre vraiment dégueulasse, surtout avec ce temps de merde... (photo: Christelle)

J'irai ensuite me dégourdir les jambes et prendre deux ou trois photos...Normalement, nous aurions du suivre cette piste :

Vers Askja...
Hélas, nous nous devons de repartir vers la civilisation...car sans une autre vidange, le tracteur ne tiendra pas longtemps. Mais je le jure ici, un jour, je ne sais pas quand, j'irai à Askja en moto!! J'en fais le serment!




Puis il sera temps de charger la moto. Une fois cela fait, je vais commencer à trépigner en attendant Christelle...

Je veux y aller! Je veux savoir!

Vais-je être capable de passer cette rivière de la mort? Vais-je être capable de repasser tous les autres gués? Vais-je me faire pipi dessus? La moto va-t-elle tenir le coup? Vais-je (encore) me planter dans le sable, ou pire, dans les cailloux?

Bref...

Vais-je pouvoir arriver au bout de mon petit défi, et boucler le Tour de l'Islande?

A suivre...


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6 commentaires:

  1. Et bien ... il est sûr que sur le moment on flippe méchamment, on s’énerve, on s'impatiente. Mais au final en prenant le temps de respirer et en prenant du recul ça fait de bon souvenirs. Un voyage où tout se passe bien c'est pas vraiment un voyage (bon on se dit pas ça sur le moment mais bon ...)

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  2. Je ne suis on ne peut plus d'accord!

    Tant qu'il n'y a pas de casse corporelle, c'est que du bonheur ! Meme si ça peut-etre du bonheur stressant...on se sent vivre!

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  3. sourires... c'est ça le voyage en moto... des moments incroyables! J'adore ont vie tout ça toujours intensément avec toi!

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  4. Merci de passer par là Thierry! :)

    Et encore merci pour m'avoir conseillé de prendre mes sangles! ;)

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  5. C'est pas dans nos contrées soit disant civilisées qu'on verra débarquer l'agence tourisque ! Même pas un petit sermon genre vous êtes vraiment des ânes...... Chapeau à ces messieurs et merci pour les aventures.
    Sam

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    1. et non même pas un petit sermon...il faut dire qu'ils doivent avoir l'habitude et que l'on était certainement pas les moins bien préparé!

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