jeudi 28 juin 2018

Maroc 2017 - Etape 7 : Un jour parfait.



Zagora - Tinghir

15 octobre





SUUUUUUUUUCHHHHH   AAAAAA PERFECT DAAAAAYYYYYYY !!!!

I'AM GLAAAD I SPENT IT ON MY MOTOOOOOORCYCLE

WITHOUT BREAKING EVERYTHIIIIIIING (not yet)

WITHOUT LOSING ANYYYYY PHOOOOOONE !!!!!!!!!!!!!

*ahem*


J'avoue, j'ai un peu changé les paroles.

Il y a des jours comme cela en voyage. Des jours où les étoiles s'alignent, et où tout semble concourir à un moment parfait, dans un subtil équilibre entre sensation d'aventure, paysages du bout du monde et rencontres mémorables. Sans soucis, sans rien casser, sans rien perdre, sans se perdre.

Ce qui ne m'arrive pas si souvent, il faut l'avouer. 


SUUUCHHHH AAAAA PERFEEEE....

Non mais, il suffit là, on a compris !

La nuit ne fut pas si mauvaise, un première depuis mon entrée sur le territoire marocain - sans doute la conséquence du grand lit de ma chambre de pourriture capitaliste. J'ai tout de même un peu de mal à me lever - sans doute la conséquence de la consommation de boissons au houblon. Et lorsque j'arrive finalement à me traîner hors du lit tel un gastéropode asthmatique, la petite bande de vieux briscards poilus qui sentent fort sous les bras est déjà sur le départ. Une partie d'entre elle est même déjà sur la route.

C'est là qu'on se demande qui est le vieux; peut-être bien moi au final ! En même temps, je vous rappelle que je suis chauve, sourd, que j'ai mal au dos, avec deux vertèbres qui se soudent, que mon sang à une concentration en cholesterol plus importante qu'en globules rouges et que j'ai de la tension. Et enfin, je n'ai ni cerveau, ni sens de l'orientation.

Je sais, formulé comme cela, je vends du rêve. On me le dit souvent.

Bref, passons...

Le départ des derniers de la bande me permettra quand même d'immortaliser quelques gueules de motards.


Doc Phil et Claude...


Christine et le Doc


Claude...


Jean-Louis, l'homme à la bière...



Quant à moi, je vais doucement faire mes affaires, et partir de l'hôtel sur les coups de dix heures. Je ne sais pas vraiment où je vais, même si j'ai repéré quelques pistes qui mènent à Tinghir, ville dont le nom revient souvent dans les récits de motards voyageurs adeptent du Maroc.

Le début de journée se fera par la route, un excellent moyen de se décoller les paupières et de me remettre de mes efforts de la veille. Je parle bien sûr des pistes sableuses ainsi que des Oueds asséchés, et non pas des cinq ou six bières que je me suis descendu comme un ivrogne avec entrain.

Cela me paraît évident.




Le long de cette grande route, je bifurque de temps à autre pour emprunter quelques petites pistes qui mènent à quelques villages isolés...









Au niveau de N'Kob, je récupère sans problème la piste indiquée sur ma carte.

Woh.

J'ai trouvé la piste du premier coup, facilement. Je suis sûr que c'est celle-ci. Et je n'ai même pas tourner pendant une heure pour en arriver là. Une grande première en dix jours de voyage !

Quand je vous disais que c'était un jour parfait : j'arrive même à m'orienter tout seul comme grand !

Merci, merci.

La suite, l'approche du col Tizi n'Tazazert, elle peut simplement se résumer en quelques photos...











Elle peut se résumer en quelques photos jusqu'au moment où je vais rencontrer des ninjas à mobylettes !

Oui, fidèles lecteurs, des ninjas à mobylette.

Revenons quelques minutes en arrière...

Depuis un certain temps maintenant  j'arpente des pistes aux allures de "gravel roads", sans gros challenge, faciles. Mais les derniers kilomètres ont changé la donne. La pente se fait maintenant plus forte, les épingles plus nombreuses, et la piste elle même ne ressemble plus vraiment à une gravel road : galets en nombre, ornières, sable sont maintenant rentrés dans le jeu.

Autant vous dire que mon niveau de stress monte en flèche, que la chute ne passe pas loin. Je profite alors d'une sorte de petit plateau pour m'arrêter afin d'évaluer la situation.

Et c'est là que je vais rencontrer des ninjas à mobylette.

Ils sont trois arrêtés là, à discuter autour de leurs mobylettes. Je les accoste, nous échangeons cigarettes, briquets et quelques mots. C'est d'ailleurs à ce moment que force jaune va débarquer...

Watata taaaaaaaah !



Bref...




J'essaie de me renseigner sur l'état de la piste...car si tout doit être maintenant comme les derniers kilomètres que je viens de parcourir, l'ascension me semble assez compromise.

Quoique...

Il faut savoir faire preuve de panache.

De toute façon, après quelques échanges avec les ninjas, je comprends aisément que la suite sera plus facile...




Sauf qu'en fait, je vais rapidement me rendre compte que j'ai du comprendre "un peu" de travers.

En plus des galets et de la terre meuble, d'énormes pierres affleurant la piste font leur apparition. Il me sera impossible de m'arrêter sereinement pour prendre des photos sauf à quelques endroits où la piste se fait plus propre.

Et heureusement, car il aurait été dommage de ne pouvoir aucunement immortaliser les paysages fous qui s'offrent à moi...




Aux oubliettes le style et la maitrise, je reste le cul vissé sur ma selle, les pieds pendants...

J'avance tout de même à bonne allure, croisant et dépassant un jeune monsieur en mobylette qui à l'air de lutter un peu également. Sauf que lui il a une mobylette, moi, j'ai un des meilleurs gros trail de pourriture capitaliste de la production moto récente.

Enfin, c'est ce que dit la publicité.

Autant dire que mon ego, ce jour là, je vais le ranger profondément dans mon sac à linge sale, entre caleçons faisandés et chaussettes à haut potentiel infectieux.

La piste continue, toujours aussi rude. Mais pas assez pour me mettre en danger. Je suis en fait de plus en plus surpris...Malgré la difficulté ressentie, je dois bien me rendre à l'évidence : j'avance sans réelle encombre.

Et je suis fier de moi, il faut bien l'admettre.

Une nouvelle partie facile va me permettre de me reposer un peu, et de prendre une sacrée...


Une sacrée photo de conn*rd !


Une autre !

Et alors que je capture donc quelques photos moches, l'homme à la mobylette, que l'on appellera Mo par pure fainéantise rédactionnelle, et que j'ai croisé en amont, déboule sur son tromblon. Dans la précipitation, je me dirige vers Berta pour dégager le chemin. Mo me fait alors signe qu'il s'arrête...

Il a besoin lui aussi de faire une pause.

Mo ne parle pas français, nous échangeons quelques signe de politesse, quant il sort alors un sachet. Il en attrappe une petite sphère, l'avale et la machouille, puis replonge ses mains dans ce sac pour en ressortir avec un tas de petites sphères que je n'identifie toujours pas.

Des Pokeball ???

Il se rapproche, me tend ses mains : ce sont des figues séchées, petites et blanches, qu'il va ensuite déposer sur ma moto...




Woh...

WOH !

WOOOOOOOH !

Pris de court par ce geste d'une grande générosité, je fouille alors dans mes valises, en ressort quelques barres de céréales industrielles, puisque je n'ai que cela sous la main, pour les lui donner en retour.

Du coup, le voilà qui me donne quelques amandes entières...

Et moi de lui donner une gourde !

On va ensuite s'arrêter là, car je sens que si ça contimue, je vais repatir en mobylette et lui, avec Berta. Je le vois venir, on ne me la fait pas !

Ses figues, craquantes au dehors et moelleuses au dedans, je les garderai précieusement une bonne partie du voyage, les dégustant comme une friandise bien méritée à chaque fin de journée.

Comme ultime cadeau, ce jeune homme m'offrira ce qui est sans doute la plus belle des photos que j'ai pu prendre lors d'un voyage...

Je lui montre l'appareil, lui demande avec quelques gestes si je peux l'immortaliser dans ces paysages magnifiques. Me voilà perché sur une petite butte, Mo s'approche spontanément de Berta, et fixe alors fièrement l'objectif...


Merci...

Nous nous quitterons peu après, chacun reprenant le trajet à son rythme sur une piste qui redevient alors (très) exigeante pour moi...


Sauf les endroits où je peux béquiller la moto pour prendre des photos, forcément.

D'un coup, je vois apparaitre une forme familière. Un rocher souvent aperçu sur de nombreuses photos de voyageurs. Sans le savoir, je suis en train d'évoluer dans ce qui est apparemment un passage obligé pour les motards voyageurs.

Alors, il sera temps. Temps de prendre quelques poses de conn*rd, dans une orgie d'égocentrisme et de narcissisme totalement indécente. Le tout à trois mille mètres d'altitude.

La. Classe.


Niveau débutant.

Niveau standard.

Niveau professionnel

Niveau Expert.

Et alors que je fais donc un peu de la merde en haute altitude, qui voilà qui arrive, tel la tortue dans la fable de la fontaine ? Je vous le mets dans le mille : Mo, l'homme à la mobylette, le guerrier du quotidien, mon héros du jour.

Le retardateur de l'appareil est déjà lancé et celui-ci est programmé pour prendre plusieurs photos. Cela me laissera le temps de me jeter sur Mo en m'agitant frénétiquement pour tenter de lui faire comprendre de prendre la pose. Le pauvre ne comprendra pas tout de suite mais se prendra rapidement au jeu. Tant mieux, car c'est un beau souvenir qui se figera sur la pellicule !

Un grand respect à lui !

Hors catégorie ! Big up to Mo !

Après une révérence en guise de remerciement pour cette pose de conn*rd totalement hors catégorie, nous repartons et nos chemins ne se recroiseront plus...

La piste va devenir plus roulante au fil des kilomètres suivant, mon esprit se libère totalement, une partie projeté vers l'avant, dans les paysages qui sont sous mes yeux, dans la conduite, dans l'instant. Une autre partie qui se refait déjà le film de la journée, qui se rend compte que celle-ci restera à jamais gravée dans ma mémoire.

Un sentiment peu commun de plénitude s'empare de moi. Et oui, rien que ça...

Je continue à me prendre en pleine gueule ces paysages magnifiques, ces pistes qui vous font croire que vous êtes un aventurier, et je fais corps avec ma machine comme rarement.

Je chiale de bonheur, un peu...

Je rigole bêtement, beaucoup, me demandant ce qu'un poireau comme moi, dénué de tout sens pratique et de l'orientation, peut bien faire là...

Je pète gentiment les plombs, en bêlant quelques chansons improvisées sous mon casque...

Et au final, aucun texte, aucun mot, aucune photo, ne pourra retranscrire ce moment, ce jour parfait. Un moment que l'on ne peut que vivre dans l'instant présent, en espèrant que l'on en gardera toujours quelques miettes dans son coeur. Juste quelques miettes, c'est déjà bien...


Mais grave !


Alors pour finir cet article, je laisse simplement place à quelques photos...






































J'avoue tout de même avoir rencontré un autochtone belliqueux...











Une fois la route retrouvée, et alors que je m'approche de Taroudant, la journée se concluera de la plus belle des manière. Le ciel se couvre d'un voile d'abord brumeux...





Puis de nuages noirs. Une pluie lourde commence à tomber...Quelques minutes plus tard, ce sera déjà fini, et le soleil percera les nuages dans un puit de lumière de toute beauté...

Une dernière image parfaite, pour une journée parfaite.

A suivre...