vendredi 12 septembre 2014

Tour Des Alpes... 13: Un col trop loin

Etape 13: Un col trop loin

Tirano (Italie) - Disentis (Suisse)




Ce matin là le réveil s’avérera…difficile.

Enfin le réveil, pas tellement.

J’ouvre les yeux, je suis bien claqué avec un syndrome rectumo-cranien assez aigu, mais ça va encore. Une petite douche, un petit dej’ plein de sucres. Et puis…

Je me fume ma clope, et quelque minutes après, ça ne va pas.

Je veux dire, ça ne va VRAIMENT pas.

Je m’assois sur le lit en me disant un truc con genre :  « Je suis tombé sur une maison d’hôte tenue par une famille de psychopathes consanguins, ils m’ont drogué pour me mettre à la cave ».

Oui ce genre d'idée me passe souvent par la tête.

Non, je ne suis pas fou.

Ou si peu.

Sauf que d’un coup me vient à l'esprit une idée beaucoup moins saugrenue, et beaucoup moins cocasse... et si j’étais en train de me taper un début de crise de vertiges ? Une crise comme j'ai pu en faire quelques semaines après chacune de mes implantations...

Sachant qu’une telle crise signifierait la fin du voyage avec rapatriement obligatoire de ma personne et de ma bécane, j’ai commencé à franchement angoisser. Un petit quart d'heure plus tard, cela ne va toujours pas fort, mais ça n'a pas empiré. 
Sachant que j’ai une très grosse étape aujourd’hui, je me décide à préparer mes affaires…de toute façon si crise de vertiges il y a, d’ici 10 ou 20 minutes je ne serais plus capable de marcher droit et je serai définitivement fixé sur mon sort.

Je prépare donc mes affaires, puis vais à la recherche d’un distributeur pour pouvoir payer mon hébergement…ça va me prendre 3 plombes, et là, il est clair que non, je n’ai pas une crise de vertige! Peut-être juste une gros coup de fatigue..ou trop de sucres au petit dej’…je n’en sais rien, je m’en fous, tant que je n’ai pas des vertiges!

En tout cas je prendrai bonne note de cet avertissement...le physique commence un peu à souffrir, il va falloir ne pas l'oublier et en tenir compte.

Mais ce n'est pas aujourd'hui que je vais me reposer, loin de là!!

Aujourd'hui je vais finir mon étape un col trop loin!

J'ai dit un col, pas un pont. Mais l'idée est là. Ça va chier.

Et me voilà donc reparti sur les routes, en étant tout de même très attentif à mes sensations sur la moto. Et les sensations ce jour là, elles seront en fait pas mauvaises du tout !
Et tant mieux car ce qui m’attend aujourd’hui ce n’est rien de moins que 400km où je vais enchaîner cols sur cols…400km ce n’est pas grand-chose, 400km de routes de cols c’est déjà beaucoup plus long. Mais quand en plus on s'arrête très souvent pour cavaler à droite, à gauche, afin de prendre des photos, 400km de routes de cols cela peut-être très long et assez fatiguant!

Je vais rouler un peu en plaine, cela va maintenant beaucoup mieux, et je vais attaquer mon premier col de la journée. Il y en aura 7 aujourd’hui ! 

(Note: le "grand" problème de la journée sera en fait cette lumière très dure que mon appareil photo n'a pas du tout apprécié...argh)





Dans ce premier col, et comme dans tout les autres de la journée, je ne croiserais pas grand monde…Je vais quand même voir un lointain cousin de Bob en tenue de cycliste!

De la Ganja à l'EPO, il n'y a qu'un pas.







Et j'ai aussi vu une Porsche garée à coté d’une ferme...

Normal.





Après une petite transition sur des routes assez quelconques, me voici rapidement à l’attaque du deuxième col de la journée...



Et celui-ci m'offrira des paysages immenses, sauvages, et presque totalement déserts…

Il n'y avait pas des masses de circulation...

Désert, désert…pas tant que ça, puisque j’y croiserais un rassemblement de futurs steaks…

Un sitting pour ne pas finir à l'abattoir. Je suppose.







Il est temps alors de redescendre, toujours agressé par une circulation des plus denses.

L'agression. Ou pas.

Au fur et à mesure de la descente je vais me retrouver dans des routes supers sympas, encastrées dans la roche de la montagne.



Pour ensuite me retrouver en forêt, puis en plaine…toujours dans de sacrées routes à conn*rd !


Les routes vont alors devenir absolument géniales, et je me suis amusé comme un petit fou, mais sans abus, à prendre ces virolos dans ce qui était un paradis pour motard!

Et puis vers 15h, j’attaque mon troisième col…oui il est déjà 15h, et je n’en suis qu’à 3 cols sur 7.

A partir de ce moment là, les routes vont rester folles, mais devenir de plus en plus exigeantes. Très exigeantes. Et pas franchement roulantes la plupart du temps, pas du tout. Mais évidemment, dans les portions "tendues", il me sera bien difficile de faire des photos...

Ce col, le Julierpass, je l’aurai aussi presque tout pour moi ! Un régal ! Avec des paysages encore une fois énormes et sauvages...













Le col suivant sera plus anecdotique…je ne le verrais presque pas passer…et me voici embarqué pour 1 heure de routes dont je n’ai pas grand souvenir ! A part ce lac, envahi de kit-surfeur à certains endroits.

Mais là, il n'y en avait pas!

Et voilà un exemple de ces routes dont je n’ai pas vraiment beaucoup de souvenirs !



Il me semble qu'à cet instant j’ai déjà enchaîné de longues et interminables séries d’épingles très étroites et franchement pas très fun. Voir carrément saoulantes à force…ce jour là, j’ai du m’en taper plus de 300 de ces maudites épingles!

Vers 17h me voici en haut du 5ème col de la journée, enfin je crois…toujours très sauvage malgré quelques habitations perdues ça et là.












En regardant du coté de la descente je vois encore ces panneaux « Smart Riders » signalant les routes à conn*rds et incitant donc à ne pas conduire comme un fou…à force je n’y fait même plus attention, il y en a partout !



Mais comme je vous disais également juste avant, depuis quelques heures c’est surtout des épingles bien difficiles à négocier que je me tape…genre de routes dans lesquelles il est très dur de prendre des photos.

Et là, c'était plutôt gentil. Épingles pas trop serrées, sans trop de dénivelé...

Et franchement quand ça fait presque 8 heures que vous êtes sur la bécane, que vous avez déjà pas mal envoyé sur quelques virolos du feu de dieu, que la fatigue se fait sentir, ce genre de route finit par être assez éprouvantes à négocier.

A presque 19h j’entame l'avant dernier col de la journée…je commence à être franchement cramé, et après chaque pause photo je me dis qu’il est temps de laisser l’appareil de coté et d’avancer pour de vrai. Oui mais voilà, ces paysages, quand on y est, sont juste magiques ! Et je ne sais pas si je pourrais y retourner un jour, alors je ne peux pas m'empêcher de m’arrêter tout les 500 mètres et de prendre ces maudites photos !











Après avoir franchi ce col, j’essaie de me décider, pour de vrai, à rouler, sans prendre de photo…

Et bah non…encore une! Argh.


Il est alors 19h30, je vais entamer des routes de plaines sans intérêt majeur…et des routes heu…roulantes. Et là, pour enfin avancer, sachant que j’ai encore beaucoup pas mal de kilomètres à faire, avec en plus un dernier col, je vais un peu visser la poignée.

(Note: en fait quand cela fait des heures qu'on se tape des épingles à des allures finalement assez réduites, rouler à 100 km/h sur une départementale donne l'impression d'être un délinquant de la route!)

Les routes à ce moment là ne seront jamais droites, mais présenteront juste de grandes courbes...très agréable! Et je vais rouler, avec le soleil qui commence doucement à se cacher, à une allure certes totalement avouable, mais plus franchement réglementaire. Les genoux serrés sur le réservoir, le corps et la tête recroquevillés derrière ma bulle, je vais filer dans la plaine suisse (ou italienne, à force on ne sait plus!), pour une gentille course contre la montre, contre la nuit, et contre le froid qui se fait de plus en plus sentir, afin de pouvoir profiter du dernier col et ne pas arriver trop tard à mon hébergement. 

Un super souvenir pour moi, mais difficile à transmettre ! Cela va durer ainsi près d’une heure !

Et puis me voici enfin à l’attaque du dernier col. Ici les routes sont pourries. On a l’impression que de grands carrés d'asphaltes sont collés les uns aux autres, et à chaque jonction, la bécane fait un petit bond avec la roue arrière qui décroche. Allure réduite obligatoire!

Il est 21 heures, la nuit commence à tomber…et il fait vraiment froid. Je m'arrête pour une dernière vraie pause afin d'enfiler un gilet, ma veste polaire, boire, et me reposer un peu. Car maintenant c’est sûr, ce dernier col, je vais le franchir de nuit, après déjà 11 heures de route.



Et je vais donc grimper, j’y vois de moins en moins, et ce sera très vite la pénombre…je ne distingue plus vraiment les paysages…j’enchaîne les épingles, je monte, la température baisse encore, le souffle se fait plus court, plus rapide, l'obscurité gagne du terrain…je suis mort, j’ai faim et qu’est ce que j’ai froid ! 
Mais je n’ai plus la force de m’arrêter pour défaire les sacs, trouver ma combinaison coupe-vent et l'enfiler. Je n’ai surtout plus la lucidité de me forcer à le faire…15 petits kilomètres me séparent encore de mon hébergement, je n’ai qu’une idée en tête, arriver !

Mais les habitudes ont la vie dure…ce col, en cette fin de journée marathon, il m’en fait baver. Et comme depuis le début du voyage, quand vraiment j’en chie, c’est selfie !

Ceci est une petite photo pourrie. Ceci est un grand souvenir.
J’entame la descente, et il fait maintenant totalement nuit…je souffle comme un bœuf pour lutter contre le froid, je descends « à fond les ballons » , j’ai l’impression d’être super concentré, alors que je suis juste mort…bref, je ne suis plus 100% lucide ! Je me retrouve à plus de 110 dans une petite portion droite, je m'engueule alors sous le casque pour me calmer un peu, et je coupe les gaz pour reprendre une vitesse plus adapté à mon état... Je suis essoufflé, j'ai froid, mes mains sont congelées, j’ai la tête qui tourne un peu à cause du manque de sucre et l'hyperventilation, j’approche…encore 4 ou 5 kilomètres.
Je prends alors une partie de route en travaux, c’est juste de la terre. Je commence à aller là dedans comme un bourrin...et je m'engueule à nouveau sous mon casque. Ca donnait un truc comme: 

« Tu te calmes là, c’est un coup à finir se foutre au tas!! »

Le genre de moment où l'on se dit que nous ne sommes pas tout seul dans ma tête.

Je me mets en première, roule à 15km/h, franchi cette partie en terre. Je relance, et le froid me revient comme une grosse claque dans la gueule !
C’est alors que je vais emmètre quelques cris du gars présentant un certain nombre de soucis psychiatriques , pour me donner un peu de courage, pour lutter contre le froid, la faim et la fatigue…

3 kilomètres, 2, 1….voilà j’y suis!!

WOUUUUUUUUUHHHH!!!!

 Dans cet esprit là.

S'en suivra alors une petite danse de la victoire, une sorte de gigue épileptique couplée à une lamentable tentative de faire des claquettes, que mes potes ne connaissent que trop bien! 

Il est 22h15…cela fait donc plus de 12 heures que je suis parti, j’ai franchi 7 cols ahurissants par leurs cotés immenses et sauvages, emprunté des routes de fous, fait le connard (un peu), négocié plus de 300 épingles, et pris des milliers de virolos.

Je suis mort, lessivé, cramé, mais, encore une fois, heureux, mais vraiment!

Et pour ajouter à mon bonheur, je vais vite m'apercevoir que le bar de l’hôtel est…un bar à bière ! Le monde est bien fait, vous ne trouvez pas ?



Une étape qui fut donc monumentale, pleine de paysages et de défi! Une de plus! 
Mais le lendemain, mon corps va décider de faire payer la facture de mes (déjà) 13 jours d’aventures: je me taperai un coup de fatigue terrible, dans une étape qui tournera presque au calvaire !


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Vous pouvez retrouver une autre partie de ma production photo (Motos, motards, street, urbex et quelques paysages) ici:

https://www.facebook.com/PicturesFromChaos.fr?ref=hl

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2 commentaires:

  1. Merci Steve Austin.
    J'en ai bouffé 4500 kms en 8 jours début Septembre et j'en redemande: vive les Alpes.

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