Etape 20: Le jour le plus long
Claviere (Italie) - Montpellier (France)
Aujourd'hui c'est mon dernier jour dans les Alpes! Et dans 3 jours, je serai à Montpellier, chez mes parents, après un petit passage dans le Var chez un pote pour boire l'apéro...
Hum...
Enfin ça, c'est ce qui était prévu! Car à l'image d'une bonne partie de mon voyage, ce dernier jour dans les Alpes va être marqué au fer rouge par le sceau du grand n'importe quoi!
Mais pour l'instant je me lève à peine dans la petite chambre de mon refuge. J’émerge doucement, je branche mes oreilles, et j'entends...la pluie. C'était écrit: ce dernier jour dans les Alpes sera pluvieux, brumeux et froid, ou ne sera pas. Le pire dans tout ça, c'est que cela me donne le sourire...et oui, il fallait que ça finisse comme ça! Ça ne pouvait pas être autrement!
13/08/14 - 9h (départ H+0):
13/08/14 - 9h (départ H+0):
Après un petit déjeuné où j'ai bu ce que je pense être le plus mauvais café de toute la galaxie, il est temps de monter mon fidèle tracteur, direction le col de la Bonette, la route la plus haute d'Europe.
Mais avant il me faudra faire un peu de slalom entre les flaques...
Je vais d'abord me diriger vers le col de l'Izoard via des routes qui, comme d'habitude, et ça devient lassant, ne méritent que des qualificatifs bien pompeux...
Lors d'un ravitaillement de mon tracteur, je passerai l'entrée d'une concession KTM pour y voir la moto de mes rêves. La seule pouvant faire office d'avion de chasse, et de super-motard (motos super maniables et pleines de patates pour s'amuser dans les routes de cols), et de moto tout-terrain. Je l'aurai un jour, je l'aurai!
13/08/14 - 10h (départ H+1):
Le col de l'Izoard, je vais donc me le taper sous la pluie, dans le froid, avec du brouillard parfois...avec le sourire aux lèvres, tout le temps. La route glisse à fond à cause de la pluie et de la température ambiante qui empêche les pneus de chauffer, c'est la lutte, c'est beau, et je suis bien. Oui ça parait dingue mais c'est vraiment dans ces moments là qu'on se sent vivre, dans ces moments là que l'on se sent un peu aventurier. Et ce sont ces moments là qui deviennent les meilleurs souvenirs, tout simplement. Et puis ce sont mes derniers kilomètres dans les Alpes que je fais là, et je compte en profiter à fond!
13/08/14 - 10h50 (départ H+1h50):
Me voici alors au sommet...
Une fois le l'Izoard franchi, je vais de nouveau rejoindre la D902, la Route des Grand Alpes, qui est à mon avis LA route à se faire une fois dans sa vie de motard voyageur, passant notamment par les cols les plus célèbres du Tour de France de nos amis les dopés (i.e, les cyclistes).
13/08/14 - 12h15 (départ H+3h15):
S'en suivra, toujours sous un temps de merde, mais toujours avec le sourire, un petit col dont je ne me souviens pas du nom...
Par contre je me souviens très bien des tartelettes à la noix trônant dans le petit café où je ferai une pause...raaaaah bordel, ça avait l'air trop bon, mais à 4 euros, soit environ mon budget bouffe de la journée, je ne ferai qu'en rêver de cette tartelette!
A l'arrache ce voyage, je vous le disais, et jusqu'au bout!
J'arriverai dans ce café trempé et frigorifié, les gens me regardant d'abord avec une certaine pitié, il faut bien le dire, puis avec un air méfiant, genre "c'est quoi ce malade?", quand je ferai l'éloge du temps pourri lors d'une balade à moto. L'éloge certes, mais je fus bien content de me caler à coté du feu pour me réchauffer les mains...tout de même!
13/08/14 - 13h25 (départ H+4h25):
Et puis, après quelques kilomètres de plaine, me voici à l'attaque de la route la plus haute d'Europe...
Cette ascension je vais donc la commencer dans la grisaille et sous une fine pluie...
Mais au fur et à mesure des kilomètres, Dame Nature va me faire un cadeau: le soleil va apparaître. Comme si après ces milliers de kilomètres, toutes ces aventures, tout ce froid, cette pluie, ce brouillard, cette fatigue, après tout ces grands moments d'euphorie et ces moments de petits doutes, j'avais gagné le droit de parcourir ce col mythique sous le soleil. Il ne faudra que le temps d'une pause sandwich pour que la route sèche...
L'ascension durera plus d'une heure, et les paysages seront, encore une fois, complètement irréels.
Et dans les derniers lacets de l'ascension, je me croirai presque dans un autre monde, avec dans mon champ de vision, la route, un environnement lunaire et le ciel. C'est tout. Rien à l'horizon, juste le ciel.
Un grand ciel bleu, mais aussi beaucoup, beaucoup de vent! La moto est secouée dans tout les sens, l'équilibre est précaire, et je suis bien content de voir enfin le sommet!
13/08/14 - 14h35 (départ H+5h35):
Le vent sera tellement fort qu'il me sera impossible de prendre une série de photo afin de reconstituer un panorama...l'appareil bouge dans tout les sens, impossible de bien le tenir! Une fois la photo au sommet dans la boîte, je ne m'attarderai pas, ce vent est juste dingue et il est impossible de se poser tranquillement.
Je vais donc faire demi-tour, car je dois ensuite repartir en direction de l'Italie par deux autres cols...
Enfin , normalement.
Sauf que je ne vais pas pouvoir...c'est la gorge serrée et les yeux embués que je vais rejoindre la plaine.
En fait non, je ments. J'ai chialé comme un gamin.
Cela fait 3 semaines que je suis parti, seul, j'ai vécu une grande aventure dans des conditions pas possibles, et je viens de faire la route la plus haute d'Europe sous un grand soleil...tout un symbole. Un sentiment m'envahi alors, j'en ai fini. J'en ai assez. J'ai réussi. Je l'ai fait ce putain de tour des Alpes. Je suis vivant, la moto a tenu le coup, j'ai tenu le coup, et maintenant...
Oui, oui, comme Forrest...Je veux rentrer chez moi.
Je veux rentrer, je veux voir des gens, prendre un apéro déraisonnable avec des potes, dormir, faire la loque chez mes parents en défonçant tout ce qu'il y a dans le frigo.
Mais si mon tour des Alpes est alors fini, la journée, elle, ne fait que commencer!
Après avoir repris mes esprits je vais envoyer un petit SMS à mon pote qui devait m'héberger le lendemain, à Salernes, dans le Var. Il est 15h30, il n'y a que 3 petites heures de routes, et en plus en passant par les Gorges du Verdon...nickel!
Sauf que mon pote ne me répond pas. Je décide tout de même de partir sans attendre sa réponse. Au pire, s'il ne peut m'héberger ce soir, je devrais pouvoir me trouver un petit hôtel dans le coin.
13/08/14 - 16h (départ H+7h):
Et me voilà donc parti en direction des Gorges du Verdon! Les gorges du Verdon, j'avais eu l'occasion d'y passer l'année dernière...mais bordel de dieu, je crois que ce sont les routes les plus joueuses que j'ai jamais faites. J'y suis arrivé bien naze, mais, petit à petit, le plaisir énorme que procure ces routes de pur conn*rd me redonnera plein d'énergie! Vers 18 heures, n'ayant toujours pas de réponse de mon pote, je vais décider de me perdre un peu et de profiter tranquillement des ces routes de frappadouille et de ces paysages qui sentent bon le sud!
Je n'ai pas pris de photos, alors je vais résumer ces quelques heures de folie motardesque en repostant un vieux cliché de mon Tour de France...
13/08/14 - 19h (départ H+10h):
N'ayant toujours pas de réponse de mon pote, je vais commencer à m'inquiéter un peu...je contacte donc sa femme sur Face de Bouc, qui me répondra assez vite: il ne capte pas à son boulot, et de la famille a débarqué à l'improviste chez eux, impossible de squatter! Argh!
Je me décide alors d'aller tout de même à Salernes, espérant pouvoir boire une bière en sa compagnie avant de trouver un hébergement...sauf qu'en arrivant à coté de Salernes, je n'ai toujours pas de réponse et mon téléphone va tomber en rade de batterie d'une minute à l'autre.
Bref...c'est la merde!
Deux solutions s'offrent alors à moi:
- Me trouver un hébergement, et finir cette dernière journée d'une manière assez décevante...sans voir personne, et en dormant encore une fois dans un hôtel à l'arrache.
Mouais, bof...
- Rentrer directement à Montpellier en me tapant le Mont Ventoux de nuit...
Voilà qui est bien plus enthousiasmant!
Enthousiasmant certes, mais n'étant pas non plus complétement inconscient, je sais que ce que je m'apprête à faire là n'est pas forcément la meilleure idée du siècle. Alors je vais m'imposer quelques règles:
- Jamais en ligne droite les 70km/h tu ne dépasseras.
- Toujours en virage une énorme marge de manœuvre tu garderas.
- Quand coup de fatigue tu auras, sur le bas coté tu dormiras.
- A chaque arrêt, étirements tu feras et eau tu boiras.
- Dès que l'occasion se présentera, café tu ingurgiteras.
13/08/14 - 20h (départ H+11h):
Après avoir philosophé un peu sur la vie en compagnie d'un gars tendance routard, dormant en prison, mais ayant des permissions de jour (une belle rencontre, sincèrement), je m’apprête à repartir. Je vais utiliser la fin de ma batterie de téléphone pour regarder le kilométrage exact jusqu'au Mont Ventoux: 180km. Soit, à 60km/h de moyenne, environ 3 heures...voir 4 avec les pauses. Tranquille!
Me voilà donc volant au-dessus des routes viroleuses du Vars, avec pour seule lumière les phares de mon tracteur, et juste accompagné par quelques renards et lapins dont je peux apercevoir les yeux brillants sur les bords de la route. (Note: une des grande déception de la journée sera que je n'ai pas réussi à en écraser un seul...pfffff).
J'ai toujours apprécié rouler de nuit, mais cette fois là, c'est vraiment un grand sentiment de plénitude que j'ai ressenti, on a vraiment l'impression de voler sur la route...et puis j'aime les défis! Tout ça a fait, que de fatigue, je ressentirai point!
J’enchaînerai doucement les kilomètres, le froid se fera de plus en plus sentir mais cela vivifie et permet de rester en alerte. Les routes tournicotent dans tout les sens, la conduite est donc sympa même avec le rythme d'invertébré arthritique que je me suis imposé.
Et puis clairement, je suis très fier de ma connerie! Parce que se dire que l'on va se taper le Mont Ventoux de nuit alors que cela fait presque 15 heures que l'on roule, c'est épique! Ça aide aussi à rester éveillé!
13/08/14 - 23h45 (départ H+14h45):
Tellement épique qu'il sera obligatoire de faire une petite pause de conn*rd pour immortaliser tout ça...
Mais au Mont Ventoux je n'y suis pas encore...
14/08/14 - 00h15 (départ H+15h15):
J'arrive au dernier petit village avant le Mont Ventoux. Et par miracle, je vais trouver un bar encore ouvert ce qui me permettra de me taper une grosse binouze. J'en avais bien besoin avant l'ascension!
Non, je déconne...j'en suis resté à un grand café des plus salvateur.
Quelques minutes après, me voici donc sur les pentes du Ventoux. La route est large et dans un état impeccable, le début de l'ascension est tranquille. Puis le vent va commencé à devenir plus...présent.
Bien plus.
C'est alors que mes deux neurones flottant dans la mélasse fermentée qui me sert de cerveau vont se connecter.
Mont Ventoux > Ventoux > Vent. Beaucoup.
Oups...
Je n'avais pas pensé à ça.
Et le vent, il va effectivement souffler très fort. Mon tracteur fait de beaux écarts de 50cm, d'un coté ou de l'autre, selon le sens des rafales. Cela reste tout à fait gérable car, vu l'absence de circulation, je peux rouler en plein milieu de la route. Mais qui dit vent, dit aussi froid. Et je vais commencer à me les geler sévèrement.
Bref, je voulais un truc épique, je suis en train de l'avoir.
L'ascension devient tendue, et dans la toute dernière épingle, présentant un très fort denivelé, alors que je suis au ralenti pour la négocier, une énorme bourrasque fera chavirer la moto. Je vais la rattraper in-extremis, heureusement!
Et me voilà alors dans une grosse pente, à l'arrêt, avec un vent qui souffle dans tout les sens en même temps, les pieds fermement ancrés au sol.
L'obscurité est totale, je suis seul, il fait super froid, je n'ai plus de batterie sur mon téléphone. Bref, je suis un peu dans la merde s'il arrive quoi que ce soit à ma moto. (Note: c'est ma moman qui doit s'arracher les cheveux en lisant ça...Maman, bisou)
Je commence à vouloir redémarrer, mes pieds quittent le sol pour revenir sur les cales-pieds...oui...mais non...c'est juste impossible, la bécane chavire de nouveau et la chute est encore évitée de peu. Je vais alors repartir à la vitesse la plus basse possible tout en restant les pieds fermement en appuis sur le sol. A chaque bourrasque mes jambes doivent fournir un véritable effort pour maintenir la moto droite...mais ça y est, je suis au panneau marquant de le sommet!
J'essaie de bloquer mon appareil photo sur les poignées de ma moto et les protège-mains, et de faire mes réglages. Mes mains sont complètement congelées. C'est la lutte, mais je finis par y arriver...
Nous sommes le 14 Août 2014, il est 1 heure 43 minutes et 28 secondes, et voici la pose de connard la plus épique de ma vie pour conclure une formidable aventure de 3 semaines:
Une fois la photo dans la boîte, je vais vite repartir. Le fameux dernier virage de la mort me donnera encore quelques sueurs, mais rapidement, au bout de 500m, je vais me retrouver à l'abri du vent, et une quinzaine de minutes plus tard, en approche de la plaine, la température redeviendra bien plus supportable.
Je vais ensuite rapidement rejoindre Avignon. A partir de là j'emprunterai des voies rapides éclairées. Peut-être, au final, la partie la plus stressante de la nuit, ayant particulièrement peur du coup de pompe soudain et des micros sommeils associés. En voiture c'est déjà très dangereux, alors en moto n'en parlons pas!
14/08/14 - 03h15 (départ H+18h15):
A partir de Nîmes, je vais emprunter l'autobeurk...la tête dans la bulle, les genoux écrasant le réservoir, en position super-kéké qui roule à 250 sauf que je n'ai pas dépassé les 110, je vais filer en direction de Saint Gêly du Fesc, en périphérie de Montpellier...
14/08/14 - 04h30 (départ H+19h30):
Et me voici alors arrivé, après une journée de près de 19h30! Une journée incroyable et folle pour finir un voyage qui le fut tout autant!
Je célébrerais tout ça par une longue danse de la victoire autour de ma moto ainsi que par quelques cris de panda hystérique, avant de m'enquiller deux grosses chopines de bière avec du Metallica dans les oreilles, et en dévorant ensuite quelques tartes flambées amoureusement préparées par ma Moman. J'ai aussi fait un génocide de Magnum...
Il est 6h30, je me couche, je souris, j'ai fini mon voyage.
C'était vraiment, vraiment n'importe quoi.
Je suis heureux.
(Note: encore un petit article, dans quelques temps, pour faire le bilan de tout cela, et il sera temps d'attaquer la préparation de mon prochain voyage...)
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Je vais d'abord me diriger vers le col de l'Izoard via des routes qui, comme d'habitude, et ça devient lassant, ne méritent que des qualificatifs bien pompeux...
Lors d'un ravitaillement de mon tracteur, je passerai l'entrée d'une concession KTM pour y voir la moto de mes rêves. La seule pouvant faire office d'avion de chasse, et de super-motard (motos super maniables et pleines de patates pour s'amuser dans les routes de cols), et de moto tout-terrain. Je l'aurai un jour, je l'aurai!
Mon banquier n'est pas d'accord. |
13/08/14 - 10h (départ H+1):
Le col de l'Izoard, je vais donc me le taper sous la pluie, dans le froid, avec du brouillard parfois...avec le sourire aux lèvres, tout le temps. La route glisse à fond à cause de la pluie et de la température ambiante qui empêche les pneus de chauffer, c'est la lutte, c'est beau, et je suis bien. Oui ça parait dingue mais c'est vraiment dans ces moments là qu'on se sent vivre, dans ces moments là que l'on se sent un peu aventurier. Et ce sont ces moments là qui deviennent les meilleurs souvenirs, tout simplement. Et puis ce sont mes derniers kilomètres dans les Alpes que je fais là, et je compte en profiter à fond!
13/08/14 - 10h50 (départ H+1h50):
Me voici alors au sommet...
La descente sera bien tendue et casse-gueule... |
Une fois le l'Izoard franchi, je vais de nouveau rejoindre la D902, la Route des Grand Alpes, qui est à mon avis LA route à se faire une fois dans sa vie de motard voyageur, passant notamment par les cols les plus célèbres du Tour de France de nos amis les dopés (i.e, les cyclistes).
13/08/14 - 12h15 (départ H+3h15):
S'en suivra, toujours sous un temps de merde, mais toujours avec le sourire, un petit col dont je ne me souviens pas du nom...
On me signale dans l'oreillette que ce serait peut-être le Col du Vars...oui...avec un "s". |
Par contre je me souviens très bien des tartelettes à la noix trônant dans le petit café où je ferai une pause...raaaaah bordel, ça avait l'air trop bon, mais à 4 euros, soit environ mon budget bouffe de la journée, je ne ferai qu'en rêver de cette tartelette!
A l'arrache ce voyage, je vous le disais, et jusqu'au bout!
J'arriverai dans ce café trempé et frigorifié, les gens me regardant d'abord avec une certaine pitié, il faut bien le dire, puis avec un air méfiant, genre "c'est quoi ce malade?", quand je ferai l'éloge du temps pourri lors d'une balade à moto. L'éloge certes, mais je fus bien content de me caler à coté du feu pour me réchauffer les mains...tout de même!
13/08/14 - 13h25 (départ H+4h25):
Et puis, après quelques kilomètres de plaine, me voici à l'attaque de la route la plus haute d'Europe...
Cette ascension je vais donc la commencer dans la grisaille et sous une fine pluie...
Mais au fur et à mesure des kilomètres, Dame Nature va me faire un cadeau: le soleil va apparaître. Comme si après ces milliers de kilomètres, toutes ces aventures, tout ce froid, cette pluie, ce brouillard, cette fatigue, après tout ces grands moments d'euphorie et ces moments de petits doutes, j'avais gagné le droit de parcourir ce col mythique sous le soleil. Il ne faudra que le temps d'une pause sandwich pour que la route sèche...
L'ascension durera plus d'une heure, et les paysages seront, encore une fois, complètement irréels.
Et dans les derniers lacets de l'ascension, je me croirai presque dans un autre monde, avec dans mon champ de vision, la route, un environnement lunaire et le ciel. C'est tout. Rien à l'horizon, juste le ciel.
Un grand ciel bleu, mais aussi beaucoup, beaucoup de vent! La moto est secouée dans tout les sens, l'équilibre est précaire, et je suis bien content de voir enfin le sommet!
13/08/14 - 14h35 (départ H+5h35):
Une belle pose de conn*ard pour une ascension épique... mais moins que celle qui suivra, cette nuit! |
Je vais donc faire demi-tour, car je dois ensuite repartir en direction de l'Italie par deux autres cols...
Enfin , normalement.
Sauf que je ne vais pas pouvoir...c'est la gorge serrée et les yeux embués que je vais rejoindre la plaine.
En fait non, je ments. J'ai chialé comme un gamin.
Cela fait 3 semaines que je suis parti, seul, j'ai vécu une grande aventure dans des conditions pas possibles, et je viens de faire la route la plus haute d'Europe sous un grand soleil...tout un symbole. Un sentiment m'envahi alors, j'en ai fini. J'en ai assez. J'ai réussi. Je l'ai fait ce putain de tour des Alpes. Je suis vivant, la moto a tenu le coup, j'ai tenu le coup, et maintenant...
Je veux rentrer chez moi. |
Oui, oui, comme Forrest...Je veux rentrer chez moi.
Je veux rentrer, je veux voir des gens, prendre un apéro déraisonnable avec des potes, dormir, faire la loque chez mes parents en défonçant tout ce qu'il y a dans le frigo.
Mais si mon tour des Alpes est alors fini, la journée, elle, ne fait que commencer!
Après avoir repris mes esprits je vais envoyer un petit SMS à mon pote qui devait m'héberger le lendemain, à Salernes, dans le Var. Il est 15h30, il n'y a que 3 petites heures de routes, et en plus en passant par les Gorges du Verdon...nickel!
Sauf que mon pote ne me répond pas. Je décide tout de même de partir sans attendre sa réponse. Au pire, s'il ne peut m'héberger ce soir, je devrais pouvoir me trouver un petit hôtel dans le coin.
13/08/14 - 16h (départ H+7h):
Et me voilà donc parti en direction des Gorges du Verdon! Les gorges du Verdon, j'avais eu l'occasion d'y passer l'année dernière...mais bordel de dieu, je crois que ce sont les routes les plus joueuses que j'ai jamais faites. J'y suis arrivé bien naze, mais, petit à petit, le plaisir énorme que procure ces routes de pur conn*rd me redonnera plein d'énergie! Vers 18 heures, n'ayant toujours pas de réponse de mon pote, je vais décider de me perdre un peu et de profiter tranquillement des ces routes de frappadouille et de ces paysages qui sentent bon le sud!
Je n'ai pas pris de photos, alors je vais résumer ces quelques heures de folie motardesque en repostant un vieux cliché de mon Tour de France...
Pas besoin d'en rajouter. |
13/08/14 - 19h (départ H+10h):
N'ayant toujours pas de réponse de mon pote, je vais commencer à m'inquiéter un peu...je contacte donc sa femme sur Face de Bouc, qui me répondra assez vite: il ne capte pas à son boulot, et de la famille a débarqué à l'improviste chez eux, impossible de squatter! Argh!
Je me décide alors d'aller tout de même à Salernes, espérant pouvoir boire une bière en sa compagnie avant de trouver un hébergement...sauf qu'en arrivant à coté de Salernes, je n'ai toujours pas de réponse et mon téléphone va tomber en rade de batterie d'une minute à l'autre.
Bref...c'est la merde!
Deux solutions s'offrent alors à moi:
- Me trouver un hébergement, et finir cette dernière journée d'une manière assez décevante...sans voir personne, et en dormant encore une fois dans un hôtel à l'arrache.
Mouais, bof...
- Rentrer directement à Montpellier en me tapant le Mont Ventoux de nuit...
Voilà qui est bien plus enthousiasmant!
Enthousiasmant certes, mais n'étant pas non plus complétement inconscient, je sais que ce que je m'apprête à faire là n'est pas forcément la meilleure idée du siècle. Alors je vais m'imposer quelques règles:
- Jamais en ligne droite les 70km/h tu ne dépasseras.
- Toujours en virage une énorme marge de manœuvre tu garderas.
- Quand coup de fatigue tu auras, sur le bas coté tu dormiras.
- A chaque arrêt, étirements tu feras et eau tu boiras.
- Dès que l'occasion se présentera, café tu ingurgiteras.
13/08/14 - 20h (départ H+11h):
Après avoir philosophé un peu sur la vie en compagnie d'un gars tendance routard, dormant en prison, mais ayant des permissions de jour (une belle rencontre, sincèrement), je m’apprête à repartir. Je vais utiliser la fin de ma batterie de téléphone pour regarder le kilométrage exact jusqu'au Mont Ventoux: 180km. Soit, à 60km/h de moyenne, environ 3 heures...voir 4 avec les pauses. Tranquille!
Me voilà donc volant au-dessus des routes viroleuses du Vars, avec pour seule lumière les phares de mon tracteur, et juste accompagné par quelques renards et lapins dont je peux apercevoir les yeux brillants sur les bords de la route. (Note: une des grande déception de la journée sera que je n'ai pas réussi à en écraser un seul...pfffff).
J'ai toujours apprécié rouler de nuit, mais cette fois là, c'est vraiment un grand sentiment de plénitude que j'ai ressenti, on a vraiment l'impression de voler sur la route...et puis j'aime les défis! Tout ça a fait, que de fatigue, je ressentirai point!
J’enchaînerai doucement les kilomètres, le froid se fera de plus en plus sentir mais cela vivifie et permet de rester en alerte. Les routes tournicotent dans tout les sens, la conduite est donc sympa même avec le rythme d'invertébré arthritique que je me suis imposé.
Et puis clairement, je suis très fier de ma connerie! Parce que se dire que l'on va se taper le Mont Ventoux de nuit alors que cela fait presque 15 heures que l'on roule, c'est épique! Ça aide aussi à rester éveillé!
13/08/14 - 23h45 (départ H+14h45):
Tellement épique qu'il sera obligatoire de faire une petite pause de conn*rd pour immortaliser tout ça...
C'est qu'il est content de lui en plus... |
Mais au Mont Ventoux je n'y suis pas encore...
14/08/14 - 00h15 (départ H+15h15):
J'arrive au dernier petit village avant le Mont Ventoux. Et par miracle, je vais trouver un bar encore ouvert ce qui me permettra de me taper une grosse binouze. J'en avais bien besoin avant l'ascension!
Non, je déconne...j'en suis resté à un grand café des plus salvateur.
Quelques minutes après, me voici donc sur les pentes du Ventoux. La route est large et dans un état impeccable, le début de l'ascension est tranquille. Puis le vent va commencé à devenir plus...présent.
Bien plus.
C'est alors que mes deux neurones flottant dans la mélasse fermentée qui me sert de cerveau vont se connecter.
Mont Ventoux > Ventoux > Vent. Beaucoup.
Oups...
Je n'avais pas pensé à ça.
Et le vent, il va effectivement souffler très fort. Mon tracteur fait de beaux écarts de 50cm, d'un coté ou de l'autre, selon le sens des rafales. Cela reste tout à fait gérable car, vu l'absence de circulation, je peux rouler en plein milieu de la route. Mais qui dit vent, dit aussi froid. Et je vais commencer à me les geler sévèrement.
Bref, je voulais un truc épique, je suis en train de l'avoir.
L'ascension devient tendue, et dans la toute dernière épingle, présentant un très fort denivelé, alors que je suis au ralenti pour la négocier, une énorme bourrasque fera chavirer la moto. Je vais la rattraper in-extremis, heureusement!
Et me voilà alors dans une grosse pente, à l'arrêt, avec un vent qui souffle dans tout les sens en même temps, les pieds fermement ancrés au sol.
L'obscurité est totale, je suis seul, il fait super froid, je n'ai plus de batterie sur mon téléphone. Bref, je suis un peu dans la merde s'il arrive quoi que ce soit à ma moto. (Note: c'est ma moman qui doit s'arracher les cheveux en lisant ça...Maman, bisou)
Je commence à vouloir redémarrer, mes pieds quittent le sol pour revenir sur les cales-pieds...oui...mais non...c'est juste impossible, la bécane chavire de nouveau et la chute est encore évitée de peu. Je vais alors repartir à la vitesse la plus basse possible tout en restant les pieds fermement en appuis sur le sol. A chaque bourrasque mes jambes doivent fournir un véritable effort pour maintenir la moto droite...mais ça y est, je suis au panneau marquant de le sommet!
J'essaie de bloquer mon appareil photo sur les poignées de ma moto et les protège-mains, et de faire mes réglages. Mes mains sont complètement congelées. C'est la lutte, mais je finis par y arriver...
Nous sommes le 14 Août 2014, il est 1 heure 43 minutes et 28 secondes, et voici la pose de connard la plus épique de ma vie pour conclure une formidable aventure de 3 semaines:
N'importe quoi. |
Une fois la photo dans la boîte, je vais vite repartir. Le fameux dernier virage de la mort me donnera encore quelques sueurs, mais rapidement, au bout de 500m, je vais me retrouver à l'abri du vent, et une quinzaine de minutes plus tard, en approche de la plaine, la température redeviendra bien plus supportable.
Je vais ensuite rapidement rejoindre Avignon. A partir de là j'emprunterai des voies rapides éclairées. Peut-être, au final, la partie la plus stressante de la nuit, ayant particulièrement peur du coup de pompe soudain et des micros sommeils associés. En voiture c'est déjà très dangereux, alors en moto n'en parlons pas!
14/08/14 - 03h15 (départ H+18h15):
A partir de Nîmes, je vais emprunter l'autobeurk...la tête dans la bulle, les genoux écrasant le réservoir, en position super-kéké qui roule à 250 sauf que je n'ai pas dépassé les 110, je vais filer en direction de Saint Gêly du Fesc, en périphérie de Montpellier...
14/08/14 - 04h30 (départ H+19h30):
Et me voici alors arrivé, après une journée de près de 19h30! Une journée incroyable et folle pour finir un voyage qui le fut tout autant!
Je célébrerais tout ça par une longue danse de la victoire autour de ma moto ainsi que par quelques cris de panda hystérique, avant de m'enquiller deux grosses chopines de bière avec du Metallica dans les oreilles, et en dévorant ensuite quelques tartes flambées amoureusement préparées par ma Moman. J'ai aussi fait un génocide de Magnum...
Il est 6h30, je me couche, je souris, j'ai fini mon voyage.
C'était vraiment, vraiment n'importe quoi.
Je suis heureux.
(Note: encore un petit article, dans quelques temps, pour faire le bilan de tout cela, et il sera temps d'attaquer la préparation de mon prochain voyage...)
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Vous pouvez retrouver une autre partie de ma production photo (Motos, motards, street, urbex et quelques paysages) ici:
https://www.facebook.com/PicturesFromChaos.fr?ref=hl
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Si vous aimez ce blog, le trouvez digne d’intérêt, n'hésitez pas à le partager avec vos potes, votre concess' moto, votre grand-mère ou votre chat... En effet, mon prochain projet de voyage, très loin, dans une contrée sauvage, va me demander un très fort investissement. Je vais donc chercher sérieusement des sponsors, et plus ce blog sera vu et partager, plus j'aurai de chance d'en trouver! Merci à vous!
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Un grand fou cet Adrian, un grand fou mais avec un coeur comme pas possible.
RépondreSupprimerCa a été un plaisir de te recevoir a la maison, et une immense joie de te retrouver au col du grand Saint Bernard sans meme se douter que nous allions nous y retrouver.
Ton prochain voyage a une escale par chez nous n'est ce pas ?
Quoi qu'il en soit tu es toujours le bienvenue a la maison. Prends juste le soin de premvenir que Fadila te prépare quelques petits plats ;);)
Ton poussin bionique ;)
T'es pas bionique mais radioactif ;)
SupprimerLe plaisir et la joie furent partagé tu t'en doutes bien :)
Et pour le prochain voyage ce n'est pas impossible! En tout cas j'aimerais bien, et mon ventre aussi! :p
Bisou tendre sur la fesse droite poussin!
Épique, Épique, et colégram qu'elle est cette fin, qui me rappelle a chaque fois que j'ai moi aussi fait ce genre de long roulages par tout les temps, après l'armée, et j'ai du mal a comprendre encore, pourquoi l'idée de le refaire aujourd'hui me laisse plus un sentiment d'inquiétude que d'excitation ?
RépondreSupprimerL'age apporte de l'expérience certes, mais supprime en échange cette petite part de folie qui fait que l'on ne se pose aucune questions sur les conditions que l'on va rencontrer en partant, Pluie, vent, froid, neige, ??????? "heu oui ba ! c'est sur c'est pas de chance, mais bon la ou je vais c'est maintenant, sinon si on attend que le temps change, c'est trop tard"
Et on partait sans se poser cette question, comme tu dis les pires moments, gelés ou trempés, nous faisaient sourire, du genre attend de voir mon slip, il est plus mouillé que le tiens, Lollllllllll, ou comment retourner une situation sensée ne pas être agréable, en concours du plus déglingué.
Merci Adrian de me faire revivre ces merveilleux souvenirs de, comment tu dis aujourd'hui ??? de ..........connard ! Lollllllllllllllll ça manque de smiley ici.
Et encore des tofs, de montagne de Ouf, qui donnent encore l'impression, et pourtant tu nous en a mis un paquet, d'être toujours encore plus étonnantes que les précédentes !
A bientôt. ^_^
Je t'avoue sans mal que moi aussi, quand je suis parti, j'étais inquiet! Mais une fois que l'on y est, on y est! Et c'est quand même vachement que de rester le cul sur son canapé (ce que j'ai fait pendant pas mal de temps à une époque)...
SupprimerMerci à toi, Yankee, pour tout tes messages sympas qui me font à chaque fois sourire, et pour tes encouragements!
V à toi!
Bon allez vas-y, craches le secret ! Comment t'as fait pour ne pas te vautrer ? Me concernant j'aurais beaucoup plus regardé le paysage que la route, et j'aurais fini plus d'une fois dans le décors {ce qui n'aurait pas été forcément désagréable ;) }
RépondreSupprimerEt tes histoires, c'est pire que les paquets de bonbons : t'en prends un, puis un autre, encore un autre, et à un moment tu te dis « faudrait reprendre l'histoire depuis le début » et glop ! j'ai gloutonné tous les articles quasiment d'une traite, comme un co**ard :D Et je peux te dire que le dernier article, je l'ai attendu !
;)
Bravo pour les aventures humaines, et motardesques que tu as traversé ! Respect et grand V !
Quentin
Je suis tout de même tombé une fois hein :p Mais je roule tellement comme un papy en générale que j'ai tout le loisir d'admirer le paysage et de m'arreter tranquillement dans le fossé sans dommage si jamais j'oublie un peut trop de regarder la route :p
SupprimerMerci pour ton message :)
V à toi
Je viens juste de finir de lire l'ensemble de ton blog et de tes aventures. Félicitations c'est superbe. Fait quand même attention aux journées à rallonge c'est dangereux meme si on se fait tous avoir. Trop prévoir de trajet et ne pas vouloir s'en écarter quand meme on l'a tous fait ^^
RépondreSupprimerJe te souhaite de la réussite dans ton futur projet de voyage. Le mien est en stand bye : argent, congés (surtout les congés) et stabilité dans les "Stan's" et consorts sont autant d'interrogation.
Ohlalaaaaaa le fou !!! Merci pour toute cette lecture, ce pétage de rétine avec tes magnifiques photos ! la folie ! Contente que tu sois bien rentré chez toi en tout cas !
RépondreSupprimerHâte de lire la prochaine épopée ☺